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L’ACAT, vous connaissez?

| ARTICLES ET REPORTAGES |
| par Richard Guay |

 

L’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) est un organisme non-gouvernemental (ONG) dont la mission initiale se devine bien à son nom. Toutefois, une brève présentation vous permettra de mieux connaître l’évolution de ce groupe œcuménique de chrétiens engagés. Nous exposerons ici comment est né et a cru l’organisme et à quelle source il s’inspire. Nous enchaînerons en décrivant son mode de fonctionnement, tout en l’illustrant par les dossiers de l’heure.


Des origines à nos jours

En 1974, deux Françaises, Édith du Tertre et Hélène Engel, entendent une conférence du pasteur Tullio Vinay qui les bouleverse. La description des tortures pratiquées au Vietnam les indigne au point où elles se mettent en demeure d’agir. C’est ainsi que naît l’ACAT France. Aujourd’hui, l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) est un mouvement international ayant une antenne au Canada et qui, par le biais de sa fédération internationale, la FIACAT, jouit d’un statut consultatif à l’ONU.

Au départ, le mouvement visait à combattre la torture partout dans le monde, sans distinction idéologique, ethnique ou religieuse. D’autres volets s’ajouteront ensuite : la dénonciation des conditions abusives de détention, le combat contre l’impunité, l’abolition de la peine de mort, la dénonciation des disparitions forcées et la défense du droit d’asile. Comme nous le verrons, les derniers numéros de notre Bulletin témoignent d’un champ d’action qui s’est encore élargi.

L’inspiration évangélique du mouvement

À la suite de Jésus, qui peut rester indifférent devant la souffrance de victimes innocentes et maltraitées? Comment ne pas se soucier de celles et ceux qu’on affame et qu’on assoiffe? Qu’on entasse dans des cellules froides, infectes et surpeuplées? Qu’on prive de toute dignité sous les coups de la torture? Comment leur fermer notre cœur tout en étant disciple de Celui qui s’identifie à ces femmes et ces hommes? « J’avais faim, et vous m’avez donné à manger; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli; j’étais nu, et vous m’avez habillé; j’étais malade, et vous m’avez visité; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi! » (Mt 25, 35-36). En incarnant par divers moyens le respect, la justice, la charité, et la solidarité auprès des membres souffrants de l’humanité, les membres de l’ACAT trouvent là une façon de marcher à la suite du Christ.

Selon un sondage récent auprès de nos membres et sympathisants, plusieurs attachent de l’importance à la spécificité chrétienne de l’ACAT. « Le Christ a été torturé avant d’être crucifié. Il est au plus près des personnes victimes de torture », écrira un répondant. Chaque saison, une équipe de bénévoles prend soin de nourrir cette spiritualité par un florilège de prières et de réflexions. De plus, une Nuit des veilleurs est organisée chaque année, à l’occasion de la Journée internationale des Nations Unies pour le soutien aux victimes de la torture (26 juin) pour soutenir dans la prière des victimes innocentes.

Fonctionnement

L’ACAT Canada agit donc pour prévenir et contrer toute forme de torture et de traitements cruels, inhumains et dégradants dans le monde et particulièrement au Canada. Ses interventions sont fondées sur la Convention contre la torture, la Déclaration universelle des droits de l’homme et plusieurs autres instruments juridiques internationaux et nationaux. Son fonctionnement s’oriente selon trois axes : le plaidoyer auprès des instances gouvernementales, le soutien aux victimes et l’éducation aux droits humains.

  1. Le plaidoyer auprès des instances gouvernementales.

La meilleure approche pour défendre les droits d’un individu ou d’un groupe consiste à rappeler aux autorités concernées de respecter leurs obligations en vertu des instruments qu’elles ont ratifiés. Cela peut se faire par des pétitions ou des lettres aux ambassades, dont celles suggérées dans chaque numéro du Bulletin. Dans un cas comme dans l’autre, c’est la force du nombre qui compte. À cet égard, nous avons constaté par un sondage que la moitié des répondants envoient toujours les lettres d’action aux autorités.

Outre les actions des membres et sympathisants, l’ACAT elle-même agit auprès des autorités canadiennes pour un plus grand respect des droits.

Un plaidoyer de longue date de l’ACAT partage avec d’autres ONG est que le Canada en vienne à signer le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture. Bien que le Canada ait été un ardent défenseur de la Convention contre la torture et a joué un rôle clé dans son adoption, la ratification de son protocole tarde depuis trop longtemps. La distinction entre ces deux documents consiste en ce qu’alors que la Convention exige des pays signataires qu’ils prennent des mesures concrètes contre la torture à l’intérieur de leurs frontières et contre le renvoi dans leur pays d’origine des personnes qui risqueraient d’y être torturées, le Protocole établit un système de visites inopinées, par des organes de surveillance indépendants, dans tous les lieux où des personnes sont privées de leur liberté (y compris les centres de détention des migrants, les établissements de santé mentale, les foyers pour mineurs, les centres de traitement de la toxicomanie, les foyers sociaux pour personnes âgées). On a pu observer chez les pays signataires du Protocole une influence positive sur leurs pratiques. On se demande bien ce que le Canada a à cacher pour ne pas signer ce Protocole!

Toujours sur la scène nationale, en partenariat avec la FIACAT, l’ACAT Canada a déposé le 5 mai dernier un Rapport alternatif devant le Comité des droits de l’homme de l’ONU au sujet du respect du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). Dans le cadre de son examen périodique universel, où les États membres de l’ONU examinent le bilan des droits de la personne de chaque pays, le Rapport questionne le Canada sur certaines de ses faiblesses en lien avec la torture et les mauvais traitements.

  1. Le soutien aux victimes.

De diverses façons, l’ACAT aide les personnes dont les droits ne sont pas respectés. Ainsi, des individus sont soutenus dans leurs démarches d’immigration pour fuir la persécution. En partenariat avec le Centre de services en justice réparatrice (CSJR) des ateliers de Guérison des mémoires sont offerts afin que des victimes de torture réfugiées ici puissent en bénéficier. Aussi, certains membres participent à un programme de correspondance avec des condamnés à mort, afin de briser leur solitude.

  1. L’éducation aux droits humains.

En regard de l’éducation aux droits humains, l’ACAT offrait régulièrement des ateliers en milieux communautaire, religieux et scolaire, mais, pandémie oblige, ces activités ont dû être mises sur pause. Toujours dans une optique de sensibilisation aux droits, l’ACAT a obtenu des fonds pour développer un jeu interactif, en collaboration avec la firme Ludopolis. En offrant le Prix Gabriel Villemure, l’organisme cherche aussi à favoriser la réflexion des étudiants sur des questions en lien avec la dignité humaine. Enfin, un volet plus large d’éducation aux droits se réalise par la publication d’articles dans le Bulletin mensuel et dans les infolettres.

Un survol des derniers numéros du Bulletin met en relief la préoccupation qu’a l’ACAT de dénoncer toute situation contraire au respect des chartes qu’un gouvernement tolère sans agir. C’est dans cette optique qu’ont été traités des sujets chauds comme la situation dans les CHSLD, les féminicides au Québec, la situation des demandeurs d’asile refoulés et la maltraitance d’enfants confiés à la DPJ.

Pour prendre ce dernier exemple, le Bulletin de juin s’attarde sur les droits des enfants de la DPJ. Passant d’abord en revue le décès de trois d’entre eux, dont celui d’une fillette de Granby en avril 2019, suite auquel la Commission Laurent fut mise sur pied, on y expose les failles du système telles que dénoncées par la Commission des droits de la personne et de la jeunesse en 2020 et par le Rapport Laurent en mai 2021. Ce dernier remet en cause l’efficacité du système d’intervention et celle de la Loi sur la protection de la jeunesse. Il souligne des manques en matière de ressources, de collaboration avec les organismes du milieu et de communication entre les différents ministères. Pour le bien de l’enfant, il recommande d’assouplir les règles de confidentialité afin que cesse le travail en silo.

Conclusion

Ce survol des activités de l’ACAT nous a permis de mettre en lumière les besoins des personnes qui souffrent, souvent dans la solitude et en silence, parce que leurs droits sont bafoués. L’ACAT se fait de diverses façons le porte-voix de ces sans voix. Par solidarité, ils ont besoin de nous; par solidarité, nous avons besoin de vous. Un premier pas pour vous serait de vous abonner à notre infolettre en faisant votre demande à acat@acatcanada.org.

 

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