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Un partage des traditions

À partir du coin supérieur droit : le rabbin Boris Dolin, de la Congregation Dorshei Emet; le pasteur Arlen Bonnar, de l’Église Unie St. James; l’imam Cheikh Mahdi Tirkawi, de l’Association des Musulmans au Canada (MAC), et la pasteure Paula Kline, directrice de la Mission communautaire de Montréal (MCM); Tom Dearhouse, un aîné de la communauté Mohawk de Kahnawake; Norman Robert, codirecteur du ministère musical à l’Église Unie St. James.

Paix. Peace. Shalom. Salam. Skén:nen. Près d’une centaine de membres des communautés juive, chrétienne et musulmane ont pris part le 22 mai à un rassemblement interconfessionnel pour célébrer le ramadan, la Shavouot et la Pentecôte. Il s’agit de la troisième année consécutive où l’iftar, le repas de rupture du jeûne dans la tradition islamique, partagé cette fois dans une synagogue, devient une occasion d’apprendre les uns des autres pour mieux vivre ensemble.

Après les mots de bienvenue, la rencontre a débuté par la reconnaissance du territoire des Premières Nations. Tom Dearhouse, un aîné de la communauté mohawk de Kahnawake, a pris la parole et s’est dit impressionné par les liens qui se créent – reprenant le symbole de la croix, il y voit une intersection entre les relations qui s’établissent avec l’Esprit supérieur et, horizontalement, entre les gens. « Chacun a un feu à l’intérieur, et ces feux mis ensemble, c’est ce qui forme une communauté », a-t-il évoqué. L’aîné suggère de poursuivre dans cette voie en s’inspirant de trois principes : skén:nen (la paix), kahnikonhr:io (le bon esprit) et kasastensera (ce qui conduit à la justice).

Le rabbin Boris Dolin, de la Congregation Dorshei Emet, a rappelé la signification de la Shavouot, qui se déroule sept semaines après la fête de Pessa’h. Célébrant le moment de l’année agricole où les premiers fruits étaient apportés en offrande au Temple, la Shavouot est aussi le jour où la Torah a été révélée à Moïse et au peuple juif sur le mont Sinaï. Les rites qui l’entourent comprennent la lecture d’une prière particulière, l’Akdamout, la consommation de produits laitiers et de fruits, la lecture du livre de Ruth, la décoration de la synagogue avec des fleurs et des plantes, et une veillée d’étude conçue comme une réparation (tikkoun). Selon le rabbin, il y a une raison importante pour laquelle la Torah a été révélée au milieu du désert, et non dans une ville ou un village : personne ne peut alors prétendre que la révélation lui appartient et que sa foi est meilleure que celle des autres. La Shavouot est donc à ses yeux un moment de fierté et d’humilité, « une manière de célébrer notre foi, nos traditions, mais aussi un rappel que nous devons quitter le mont Sinaï et aller dans le monde, afin d’apprendre les uns des autres et d’entrer en contact avec la diversité des croyances et des cultures ».

Après avoir récité en arabe un verset du Coran touchant le ramadan, l’imam Cheikh Mahdi Tirkawi, représentant l’Association des Musulmans au Canada (MAC), a expliqué en français l’importance du jeûne. Dieu, souligne-t-il, dit que ceux qui portent la foi pratiquent ce jeûne comme l’ont pratiqué déjà de nombreux peuples. Celui-ci s’inscrit donc dans une logique de continuité, et il n’y a pas de cassure avec les autres religions. Lorsque le prophète de l’islam, Muhammad, est arrivé à Médine, il a vu les juifs jeûner pour célébrer le jour où Moïse a été délivré. Dans la tradition musulmane, il est depuis fortement conseillé d’effectuer le jeune d’Achoura, pour célébrer l’exode juif. Dans la manière de jeûner, remarque toutefois l’imam, on voit des particularités : « C’est ça aussi qui est beau à remarquer. On va tous traverser la rive, mais on va embarquer dans des barques différentes. On a tous un objectif commun, mais on va avoir des différences, qui vont faire en sorte non pas qu’on ne s’entende pas, mais plutôt qu’on apprenne à se connaître et, dans le respect, qu’on s’enrichisse les uns auprès des autres. » L’autre trait important du jeûne, c’est sa finalité : « L’objectif supérieur, c’est d’avoir une pleine conscience que Dieu est présent et veille sur moi. » L’imam considère trois niveaux de conscience. Le jeûne basique, c’est s’abstenir de boire et de manger, pour remercier Dieu de pouvoir manger à sa faim, en ayant conscience que d’autres n’ont pas cette chance. À un deuxième niveau de conscience, Dieu pousse le pratiquant à tendre vers l’excellence dans ses propos comme dans sa manière d’agir. Le troisième et dernier niveau, c’est celui où le pratiquant surveille les suggestions de l’âme : « Dieu sait ce que je fais. Avec sa miséricorde, il ne me condamne pas, mais je sais qu’il me surveille pour m’aider à arrêter les mauvais penchants et à laisser libre cours au bon. »

Enfin, le pasteur Arlen Bonnar, de l’Église Unie St. James, a exposé en anglais la signification de la Pentecôte, qui célèbre la descente de la troisième personne de la trinité chrétienne, l’Esprit-Saint. En reconnaissant des recoupements avec la tradition judaïque, le pasteur relate d’abord le désarroi dans lequel se sont retrouvés les disciples après l’Ascension, alors que celui qu’ils appelaient rabbin, qu’ils voyaient comme un messie et qui leur donnait des enseignements venait de disparaître. Qu’allaient-ils faire dorénavant, en tant que communauté de foi? Jésus leur avait répété que Dieu ne les laisserait jamais seuls, même quand il partirait. Le Nouveau Testament nous dit que, dix jours après l’Ascension, alors que les disciples étaient réunis à Jérusalem, un vent puissant s’est levé, après quoi des feux se sont posés sur chacune des personnes présentes, sans les consumer. La puissance de Dieu donnait à cette communauté une nouvelle force de vie; et, chose stupéfiante, avec le souffle de l’Esprit, chacun s’est mis à comprendre la langue de l’autre. « Tous pouvaient se parler, partager, se comprendre, comme nous le faisons ici ce soir », décrit le pasteur. « C’est ainsi que la descente de l’Esprit sur cette communauté a marqué le début de l’Église chrétienne. Et c’est la présence permanente de cet Esprit qui nous conduit dans le monde et vers l’avenir. »

Faisant écho à ces propos, à la demande du pasteur, Norman Robert, codirecteur du ministère musical à l’Église Unie St. James, a par la suite chanté le Veni Creator Spiritus en français, en anglais et en latin. « Je trouve très intéressant de faire partie d’un événement où les trois grandes religions sont représentées et où chacun peut s’exprimer », a-t-il commenté, en se réjouissant de l’absence de jugement et de la qualité de l’accueil. Pour sa part, le groupe Moujaber a interprété des chants islamiques sur des musiques de facture contemporaine, faisant des emprunts au rap et au techno.

— Suzanne Grenier, pour Aujourd’hui Credo

Une réponse à

  1. Paula Kline says:

    Merci Suzanne! Un très beau résumé.

    L’évènement a été organisé par un comité inter-confessionnel chapeauté par la Mission communautaire de Montréal / Montreal City Mission (McM), un ministère communautaire de l’Église unie et notre coordonnateur inter-confessionel, Anwar Alhjooj.

    Au plaisir!

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