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«Nous procurons une table où chacun trouve de la nourriture pour le corps, l’âme et l’esprit ; une table où tous sont les bienvenus.»
Ainsi s’énonce la vision qui donne du cœur à l’ouvrage aux membres actifs de l’Église Unie du Sud-Ouest et sa Mission Verdun.
« Il nous a fallu près d’une décennie pour en arriver à cette clarté », souligne le pasteur David Lefneski, qui a joué un rôle de leader dans ce que l’on pourrait décrire comme une régénérescence de ce ministère. La transformation a impliqué beaucoup de discussions et des décisions majeures, notamment la vente de la plus grande des deux églises que possédaient deux paroisses maintenant fusionnées, Crawford Park and Verdun United. Le pasteur y voit toutefois une œuvre de continuité : « Depuis le début de l’histoire de l’Église Unie à Verdun, en 1899, il y a des racines méthodistes. C’est une paroisse qui s’enracine dans les besoins de la communauté, autant spirituels que physiques. »
En puisant dans notre histoire
Très tôt, donc, la paroisse s’est posé la question : comment vivre une Bonne Nouvelle non seulement de façon pure au sein de notre communauté de foi, mais en lien avec tout notre voisinage. La petite église conservée rue Clémenceau se prêtant mal aux services communautaires projetés, des recherches ont été faites dans le milieu, et l’École primaire de Verdun a offert un partenariat. « Nous collaborions déjà, souligne le pasteur. Pour des paniers de Noël, des vêtements usagés et d’autres services. » Des investissements ont été faits et des locaux de l’école ont été réaménagés, pour installer les cuisines à partir desquelles allaient fructifier des activités ciblant – car il a fallu éviter la dispersion – la sécurité alimentaire pour tous. Aujourd’hui, plus de 300 familles en bénéficient, et les initiatives bourgeonnent : Club des petits-déjeuners, halte-allaitement, cuisine collective, atelier de cuisine pour adolescents, jardin communautaire, lunchs communautaires, mini-marché, etc. Parmi les partenaires, on compte la Commission scolaire Lester B. Pearson, Moisson Montréal, Centraide, Riverview CLC, Repaire jeunesse Dawson, Le Grand Potager et Un plant de tomate à la fois.
« Nous n’étions plus dans une église, mais nous avons posé des vitraux », relate le pasteur. « Nous avons choisi les paraboles du Bon Samaritain et de la Brebis égarée, car elles ont une résonance auprès des enfants et de notre communauté. Et parce qu’elles ne sont pas uniquement définies par la foi chrétienne, mais par une foi ouverte et généreuse. »
Mourir pour renaître
Certes, la vente d’une église a délesté la paroisse d’une charge coûteuse et a servi de levier financier pour les projets communautaires. L’expérience que décrit David Lefneski montre que l’investissement majeur s’est toutefois fait sur le long terme, et à un niveau beaucoup plus fondamental, soit celui des relations interpersonnelles. Il décrit l’ampleur de ce travail : « Ça a pris, je dirais, de 1998 à 2007, plusieurs années de conversations avec les anciens, avec les membres de la paroisse, avec la communauté. S’ouvrir en français, par exemple, vers nos voisins. Marier deux femmes, deux hommes, un musulman avec une chrétienne. Ça s’est fait une question à la fois. On a prié. On s’est chicanés. On a parlé. Toujours dans le respect. Les vraies relations, c’est ça qui soutient une communauté. D’ailleurs, si on ne peut pas vivre ensemble sur le terrain, pourquoi chercher à vivre ensemble dans une structure ? »
Le pasteur voit dans les défis de l’évangélisation dans le monde actuel un passage par le chaos, exigeant d’affronter ses peurs, une large part de renoncement et un consentement à perdre le contrôle : « Le dimanche, dans Matthieu, Marie et Marie-Madeleine arrivent au tombeau et il y a un tremblement de terre. Pour moi, la vie de Pâques, c’est justement un tremblement de terre, qui enlève ce qu’il y a sous tes pieds. Tu ne sais plus où marcher. Tout est à l’envers. Il y a la destruction de plein de choses. Et là tu dois te redéfinir dans cette histoire de vie nouvelle. »
En quoi consistera le prochain cycle ? Faudrait-il se départir d’une autre église pour poursuivre la vision ? Le pasteur n’écarte pas la possibilité : « À la Mission, on n’a pas vraiment d’adresse. On a mis notre sort dans les hauts et les bas des changements communautaires, avec les écoles, CLSC, hôpitaux qui sont aussi fragiles que l’Église, et on a dit “Nous sommes ensemble”. »
Cette attitude porte l’écho d’un chant ancien, hérité des guerres de religion mais que le pasteur reprend simplement comme l’expression d’une foi vivante : « Il faut qu’en Dieu l’on se confie ; la paix du cœur se trouve en lui1. »
Selon David Lefneski, la qualité d’un bon leadership, c’est d’être adaptatif. Est-ce que les budgets de l’Église sont assez souples pour s’adapter à la réalité ? « EDGE peut nous outiller, nous soutenir, mais c’est nous, localement, qui devons être innovateurs. Et c’est à cette échelle qu’il faut être à l’écoute des besoins. »
1 Psaume no 41 dans Nos voix unies. Paroles de Georg Neumark (1657) et traduction de Lisette Levis-Beaudin.