| NUMÉRO HORS SÉRIE « VÉRITÉ ET RÉCONCILIATION : LES AUTOCHTONES ET L’ÉGLISE » |
Cette litanie, avec son historique, se réfère aux souvenirs du pasteur Stanley McKay, ancien modérateur, et à ceux d’autres personnes qui ont pris part aux toutes premières consultations nationales sur les ministères autochtones dans les années 1980. Texte original de la pasteure Susan Beaver, de Grand River United Church.
Dieu d’amour, nous sommes ton Église, à l’oeuvre en faveur de ton amour, de ta justice et de ta paix dans le monde.
Guide-nous par ton Saint-Esprit.
Tu nous donnes le commandement de l’amour et un maître à suivre pour ce faire.
Guide-nous et édifie-nous durant notre marche à sa suite.
Nous, l’Église, n’avons pas toujours réalisé les façons dont nous avons manqué à ce commandement, les manières par lesquelles nous avons causé des souffrances spirituelles, politiques, économiques, culturelles, émotionnelles et physiques aux populations autochtones du Canada.
Secoue notre torpeur et guide-nous vers l’avant, ensemble.
Les peuples autochtones font preuve de résilience, et tu leur demeures fidèle en leur accordant force et courage.
Aide-nous à mettre en commun notre foi et notre force. … Continue d’envoyer tes prophètes parmi nous, un encouragement ininterrompu.
En 1986, près de 80 personnes autochtones se sont rassemblées à Sudbury pour la Consultation nationale sur les ministères autochtones en marge du Conseil général.
Les membres de la consultation se sont exprimés devant l’assemblée : Nous demandons de telles excuses à l’Église. Puis ils ont quitté la rencontre en invitant les délégués autochtones à les rejoindre autour du feu sacré, non loin de là.
Nous demeurons en silence, notre seul soutien est en Toi, Dieu saint.
Les quatre-vingts participants et participantes à la consultation et une douzaine de personnes déléguées se sont retrouvés autour du feu sacré par cette journée nuageuse. Les Aînés anishnaabes Art Solomon et Jim Dumont ont alors partagé des enseignements puis ont conduit les gens dans la prière. À la tombée de la nuit, des personnes autochtones de communautés environnantes se sont jointes au cercle, doublant ainsi le nombre de gens qui attendaient. Nul ne savait ce que l’Église déciderait de faire. Cette attente était difficile.
Quelle bénédiction que de voir le cercle s’agrandir et se consolider. Puisse-t-il continuer à s’élargir.
Les Aînés Edith Memnook, Murray Whetung, Stanley McKay père, Dora Benson, le pasteur Johnson Garrioch, Ph.D., et d’autres personnes attendaient dans un tipi, près du feu. Ils ont été appelés pour être les premiers à entendre la réponse du modérateur au nom de l’Église Unie du Canada.
Il est difficile d’attendre et de vivre dans l’incertitude.
Accorde-nous la force, l’espérance et la patience, aujourd’hui comme jadis.
[…] Après que le modérateur ait rencontré les Aînés, il s’est approché du feu sacré, parmi tous les gens regroupés, puis il a prononcé ces paroles d’excuses :Bien avant que notre peuple arrive sur ces terres, votre peuple y vivait déjà. Vous teniez de vos anciens une connaissance riche et profonde de la création et du Mystère qui nous entoure, et cette connaissance était pour vous un trésor.
Quand vous avez partagé votre compréhension du monde, nous avons fait la sourde oreille. Dans notre empressement à vous transmettre la bonne nouvelle de Jésus-Christ, nous sommes demeurés insensibles à la richesse de votre spiritualité.
Nous n’avons pas su dissocier notre culture et nos moeurs occidentales de toute l’ampleur et la profondeur de l’évangile du Christ.
Nous vous avons imposé notre civilisation comme condition pour recevoir l’Évangile.
En essayant de vous modeler à notre image, nous avons contribué à détruire la vision à l’origine de votre spécificité. De sorte qu’aujourd’hui nous sommes plus pauvres les uns et les autres. Nous portons en nous une image trouble, déformée, de notre Créateur et nous nous sommes éloignés de ce à quoi Dieu nous appelait. Nous demandons votre pardon. Marchons ensemble dans l’esprit du Christ afin que nos peuples soient bénis et que la création de Dieu puisse guérir.
Après avoir entendu ces excuses, les gens ont dansé. Un participant a déclaré qu’il avait dansé comme jamais auparavant. Il n’avait jamais osé espérer que l’Église présenterait des excuses. Ces excuses et cette danse ont réorienté toute l’Église dans une nouvelle direction sur les chemins de l’histoire. […]
À toi toute gloire, Dieu très saint.
Le lendemain matin, les Aînés ont conseillé aux personnes autochtones de simplement prendre acte de la déclaration d’excuses, et de la rapporter chez eux pour que les gens puissent l’entendre et discerner ce que signifie vivre conformément à cette déclaration d’excuses, car la période qui débutait alors allait être exigeante.
Dieu de sagesse et de grâce, continue de marcher avec nous.
En 1988, lors du 32e Conseil général à Victoria, l’Aînée Edith Memnook, une déléguée laïque du tout nouveau Synode autochtone, a présenté cette réponse aux excuses :
Les excuses aux peuples des Premières Nations du Canada, présentées par l’Église Unie du Canada à Sudbury en août 1986, ont marqué un progrès très important. Il est réconfortant de constater que l’Église Unie du Canada fait figure de précurseur en présentant ces excuses aux peuples des Premières Nations. Le Synode autochtone a maintenant reconnu vos excuses. Nos peuples ont continué d’honorer les enseignements du mode de vie autochtone. Nos valeurs et enseignements spirituels nous ont appris à respecter le Feu sacré, à être les gardiens de la Terre mère et à chercher à valoriser l’harmonie et la coexistence pacifique avec tous les peuples. Nous vous demandons seulement de respecter notre Feu sacré, la Création et la coexistence paisible avec nous. Nous reconnaissons que des préjudices ont été causés et que les blessures vont demeurer vives parmi les nôtres, mais grâce aux liens de partenariat et aux efforts de collaboration, l’esprit indien finira par guérir. En misant sur l’amour, la compréhension et la sincérité, nous pouvons réaliser une communauté de frères et de soeurs, dans l’unité, la force et le respect. Les peuples autochtones du Synode autochtone expriment le souhait et la prière « que les excuses ne soient pas un énoncé symbolique, mais bien l’affirmation sincère d’une intention d’agir ». Nous apprécions la liberté dont nous jouissons sur le plan de l’expression culturelle et religieuse. Dans le nouvel esprit créé par ces excuses, veillons à unir nos cœurs et nos esprits dans la plénitude de la vie que le Grand Esprit nous a donnée.
Grand Esprit, accorde-nous l’unité alors que nous poursuivons notre marche vers la justice, la réconciliation, la création de liens familiaux et la vie avec respect dans la création.