
Comment pouvons-nous accompagner les gens dans cette vallée d’inquiétude, de peur et de mort?
Eileen R. Campbell-Reed
Le 10 mars 2020
Alors que les fonctionnaires débattent encore si le nouveau coronavirus a atteint l’état de pandémie, l’épidémie se répand mondialement. Pendant ce temps, les leaders religieux doivent continuer à prendre soin des gens, dont bon nombre ressentent une inquiétude croissante parfois frôlant la panique.
De quelle façon les divers types d’intervenants pastoraux (pasteures et pasteurs, aumôniers et aumônières, etc.), de conseillers et d’éducateurs peuvent-ils prodiguer un accompagnement pastoral dans la traversée de cette vallée d’inquiétude, de peur et de mort? Voici 10 conseils élémentaires sous ce rapport.
- Surveillez et mettez en application les directives de la santé publique. Les centres de contrôle des maladies, l’Organisation mondiale de la Santé, et votre service de santé publique suivent attentivement l’évolution de la situation. Suivez leurs directives. Assurez-vous de demeurer vous-même en santé. (Comme l’agente de bord nous en avise : Si les masques à oxygène sont déployés, mettez d’abord le vôtre avant d’aider quelqu’un d’autre!) Par votre comportement, donnez aux autres l’exemple d’une présence centrée, attentive, qui ne cède pas à la panique. Des renseignements de base fiables sont diffusés un peu partout, mais parfois lorsque l’anxiété est grande, s’arrêter pour prendre connaissance même de choses élémentaires peut s’avérer un défi réel. Le partage de cette information peut devenir un élément des soins pastoraux.
- Incarnez une présence non anxieuse. Même si vous étiez assoupie durant votre classe en soins pastoraux au séminaire, vous vous souvenez probablement de cette phrase. C’est qu’en fait démontrer une présence calme, attentive au vécu émotif et dépourvue d’anxiété génère la confiance et apporte en soi le soutien requis, peu importe la crise, que ce soit une coupure superficielle avec une feuille de papier ou une pandémie. Pour la personne qui prodigue ces soins, être là sans anxiété implique qu’elle-même gère adéquatement ses propres sentiments, afin de ne pas carrément fuir la situation en courant ni de la contaminer avec ses propres émotions et appréhensions. Les gens autour de nous vont venir puiser à notre calme et notre compassion pour s’aider eux-mêmes à faire baisser leur anxiété.
- Soyez visible pour les gens, même si ce n’est pas en personne. Évitez les contacts physiques est un mot d’ordre de cette crise, particulièrement pour les personnes de plus de ans. Certains groupes de personnes vont subir une stigmatisation sociale dans le contexte de cette maladie. De nos jours, nous pouvons côtoyer les gens par l’entremise des outils numériques. Ce n’est pas la même chose que de pouvoir ouvrir les bras et tenir la main de quelqu’un, mais la technologie nous donne la chance d’une solution de rechange viable. Vous êtes sûrement déjà reliés à beaucoup de personnes sur divers médias sociaux, alors utilisez-les avec discernement pour offrir votre soutien.
- Écoutez avec amour. Peu importe le déroulement d’une crise, offrir une écoute de qualité est une constante permanente et un cadeau des plus efficaces. Par notre écoute, nous incarnons l’amour sacré, nous exprimons l’amour et la sollicitude de l’ensemble de la communauté. Une écoute empreinte de compassion est justement ce dont les gens ont besoin alors qu’ils sont confrontés aux circonstances bouleversantes et incontrôlables d’une crise.
- Trouvez des manières de faire communauté. Chez l’être humain, le désir d’entraide est étonnement fort. Même si l’apparition d’une crise peut conduire certaines personnes à se replier sur elle-même, l’occasion est éminemment propice à se serrer les coudes et à se soutenir mutuellement. Des intervenantes et des intervenants pastoraux qui font preuve de leadership et d’imagination peuvent devenir un pôle de regroupement des gens autour d’une offre de soins bien organisés et de façon durable sur le moyen et long terme.
- Aidez les gens à garder une perspective à long terme. L’enjeu est de trouver des façons de se rappeler que la présence aimante de Dieu était déjà là bien avant le début de l’univers et qu’elle continuera bien après la disparition de l’univers. Se situer personnellement comme une partie d’un tableau infiniment plus grand favorise la conscience d’être enraciné et suscite de l’espoir. Cela contribue à préserver un sentiment d’espérance à l’égard de la présence d’un Dieu d’amour dans notre vie actuelle, alors même que les circonstances grugent notre espoir.
- Préservez vos valeurs bien en évidence. Le personnel et les intervenants pastoraux en soins palliatifs nous rappellent souvent que les gens meurent comme ils ont vécu. Bien que toutes les crises ne soient pas fatales, tous et toutes nous allons un jour mourir. Dans les moments inquiétants, notre tâche est d’inviter les personnes à vivre au meilleur de leur capacité d’être en ce monde. Cela ne signifie pas manquer d’honnêteté à propos d’une situation de crise et des dangers encourus. Cela signifie que nous continuons à compter sur le soutien de la présence de Dieu, de l’amour du prochain, et à faire face à la mort avec les mêmes objectifs et les mêmes valeurs qui nous font vivre.
- Ne craignez pas d’aborder le sujet de la mort. Lors d’une conversation avec des gens effrayés, il peut arriver qu’assez rapidement la peur sous-jacente de la mort apparaisse. Lorsque cela se produit, ne changez pas de sujet. Aider les personnes à bien vivre leur deuil – avant, pendant et après l’expérience de la perte – contribue à leur permettre de mieux vivre toutes les dimensions de leur existence. Laisser de la place pour parler de la mort signifie dans les faits augmenter la capacité de vivre chaque instant comme un présent reçu.
- Priez. Formuler une prière pour des personnes anxieuses et en besoin peut aider à donner un sens nouveau à ce qui est vécu. Toutefois, en situation de traumatisme et de crise, l’abondance de mots peut sonner creux et la prière même être perçue comme une façon de se faire juger ou sermonner. Une prière participative est peut-être la meilleure approche en un tel cas. Nous participons à la vie de Dieu et à la vie des unes, des uns et des autres en étant simplement là, ensemble, en méditant en silence et en ravivant notre objectif d’existence, en témoignant avec honnêteté de ce qu’évoque la situation.
- Prenez une pause. Rappelez-vous que vous aussi êtes une créature qui a ses limites. Veillez à prendre soin de vos propres besoins. Allez puiser du soutien dans votre propre communauté. Prodiguer des soins à tour de rôle, en équipe, avec d’autres personnes. En situation de crise, la tentation fréquente est de croire qu’il faut tout donner et tout faire immédiatement. La plupart du temps, c’est impossible. Le sabbat n’est pas un luxe. Prendre soin de soi n’est pas un geste égoïste. Alors que cette épidémie va continuer à se déployer dans la durée, assurez-vous de prendre les moyens pour renouveler vos énergies et votre espérance dans l’Esprit de Dieu.
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Nos remerciements à Christian Century de nous avoir accordé la permission de reproduire cet article en version française.